29/12/2021
« En tout cas, il est hasardeux, voire absurde de penser que la musique dit quelque chose qu’ontologiquement elle est incapable de dire puisqu’elle ne dit ni ne décrit rien. » Le lecteur aura peut-être sursauté, car, évidemment, cette remarque ne saurait s'appliquer à n'importe quelle musique. Aussi faut-il situer ce passage dans son contexte. Un musicologue, Bernard Fournier, estime dans Le Monde que « La récupération idéologique de la "7e Symphonie" de Beethoven par Eric Zemmour relève de la tromperie. »
Le candidat avait utilisé le deuxième mouvement de cette œuvre pour sa vidéo de déclaration (relire l'entrée du 30 novembre). Est-ce une récupération idéologique ? On ne voit pas en quoi. Y a-t-il tromperie ? J'ai du mal à la situer. Quand François Mitterrand faisait retentir à la fin de ses meetings de 1988 le dernier mouvement d'une autre symphonie de Beethoven, la 5e, personne ne venait pointer une récupération ou une tromperie. À juste titre, me semble-t-il.
Évidemment, ce n'est pas un hasard si Zemmour a fait son choix dans le trésor musical légué par le génie européen, cet héritage d'une civilisation qu'il évoque dans son discours de vœux : « Une civilisation qui considère que le beau lui aussi est sacré. La civilisation de Rembrandt, Léonard de Vinci, Bach, Mozart, Beethoven ». Aurions-nous préféré qu'il accompagne sa déclaration de rock, de rap ou de raï ?
De plus, ainsi que je le disais alors, il me semble évident, sans que je puisse le prouver, que ce choix musical est un clin d'œil aux admirateurs de Johnny Hallyday. Il est possible que l'article du Monde en parle, car sans accès à son contenu je ne puis prendre connaissance de l'argumentaire développé par le musicologue pour établir le bien-fondé d'une tromperie annoncée. Je demanderais bien à l'un de mes lecteurs que de dépanner, si je n'avais aucun lecteur, ou presque.
Mila est une jeune femme menacée de mort par des islamistes. Ceux qui auront oublié l'affaire peuvent lire l'entretien que l'avocat Richard Malka donnait en juillet passé à l'Express. Tout à l'heure, Mila a posté le tweet suivant :
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Tweet de Mila sur Zemmour (lien) |
« Je n’aime pas Éric Zemmour, et l’encourager va à l’encontre de mes valeurs.
Mais je suis tellement terrorisée dans mon propre Pays, que je me dis qu’on n’a plus d’autre choix que de passer au moins un temps par cette radicalisation bien qu’elle me déplaise. Pour rester en vie. »
Mila précise : « Je n’ai jamais dis [sic] que j’allais voter Zemmour, je me pose seulement parfois des questions alors que généralement je ne le soutiens pas, comme beaucoup. » Certains s'étonnent de cette possibilité de voir Mila voter pour Reconquête. Elle leur répond : « Je suis d’accord avec vous, et voter pour un extrémiste est la dernière chose que je veux, en revanche quand on en arrive à un point où on craint pour sa survie chaque seconde, on est perdu. On est perdu et on ne sait pas toujours vers où se diriger. À gauche comme à droite. »
Envolée de récriminations. Quoi ! Voter, ou envisager de voter, même si c'était en dernière extrémité, pour un fasciste, un nazi, un complice objectif des jihadistes, Dieu, comment est-ce possible ? Raphaël Enthoven :
« Chère @magicalorrs, Zemmour a du "respect" pour les islamistes qui ont "le courage de mourir pour ce qu'ils croient." (Causeur, 2017) Votre peur est mauvaise conseillère, vous vous trompez d'allié. »
Il achève son tweet par un dessin symbolisant des mains jointes, que je ne sais pas comment interpréter, en omettant de rappeler que ces propos de Zemmour étaient un avertissement lancé à ceux qui mépriseraient le danger (lire sur Causeur cet avis d'Élisabeth Lévy).
Zemmour, ou l'homme derrière son compte Twitter, répond à la jeune femme : « Mila, ceux qui veulent vous intimider pour ce message ont un point commun : ils acceptent l’islamisation de la France, tout en pleurant hypocritement sur votre sort. Nos désaccords ne sont rien au regard de la volonté qui nous unit : vivre libres dans une France en paix. »
Les mots terribles de Mila, pour notre malheur, sonnent juste. Ils recoupent point à point des réflexions du même ordre faites par bien des Français de ma connaissance. Je les comprends et les approuve, quand bien même elles heurtent la conscience de l'honnête homme : on a beau ne pas partager grand-chose de l'idéologie du candidat, force est de constater qu'il est le seul, dans l'offre actuelle, à répondre à une angoisse existentielle, « pour rester en vie. »
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