dimanche 12 septembre 2021

Zemmour au fil des jours - 12 septembre 2021

12/11/2021

Cette nuit, Laurent Ruquier invitait Éric Zemmour dans son émission. L'attente était forte, pour plusieurs raisons. Ruquier a fait connaître Z au grand public, des années durant, en lui confiant un rôle de chroniqueur dans On n'est pas couché, avant de le regretter amèrement et de se poser en adversaire de ses idées politiques. On se doutait bien que ces deux-là avaient quelques comptes à régler. C'était aussi la première émission consécutive à l'arrêt du CSA. Et puis la présence de Léa Salamé, elle aussi ex-chroniqueuse à ONPC et engagée dans les causes progressistes (ou prétendues telles), apportait du piquant à l'affiche.

Les débats furent décevants. En dépit de son titre, "On est en direct", cette émission donne la curieuse impression, à certains moments, d'avoir été montée, et que certains échanges ont disparu. Impression sans doute fausse : si ç'avait été le cas, Zemmour n'aurait pas manqué de le signaler. Le malaise est ailleurs. Ruquier, avec ses interruptions, saillies et traits d'esprit, empêche tout développement de la pensée de son invité. On sait bien que le discours de celui-ci lui déplaît profondément, c'est entendu, et qu'il souhaite affirmer aux yeux de tous qu'il n'a rien voir avec la pensée de son ex-chroniqueur - et, sans doute, ses interventions sont-elles le fruit d'une réelle culpabilité de l'avoir laissé parler tant d'années dans son émission précédente. Je ne suis pas dupe, je ne suis pas complice, et le fais voir à tout instant, telles semblent être les obsessions de Ruquier, tant est forte sa crainte d'être considéré comme apostat par une certaine gauche. Montrer patte blanche, à tout propos et à tout instant, pour échapper à l'infâme soupçon d'être fiché Z.

Une déplaisante sourdine accompagne les échanges. La gué-guerre contre Cnews, à coup de batailles de chiffres et de piques soudaines : "à Cnews, il n'y a personne qui vous contredit. Ça vous fait du bien, un peu", plaisante Ruquier. Il ajoute plus tard, quand Z affirme qu'il ne se laissera pas presser par l'insistance de Léa Salamé : "Il rend l'antenne à Pascal Praud à 20h10, parfois, ça veut bien dire qu'il s'en fout" (Pascal Praud, que certains considèrent, dans un certain milieu, comme un autre symbole de ce "fascisme" dont Cnews porterait la voix. En prononçant son nom, Ruquier envoie mine de rien un signal éloquent à ses camarades de la bien-pensance).

Léa Salamé, précisément, a le sans-gêne de prendre plus d'une minute pour formuler péniblement une question, pour ensuite interrompre la réponse de Zemmour au bout de 30 secondes. Ce n'est d'ailleurs pas vraiment un questionnement : elle suppose à son interlocuteur des pensées extrémistes, les jette en rafales pour ensuite adjurer l'interviewé d'apporter prestement des réponses, se défendant, quand on lui fait remarquer que ce sont des accusations, qu'elle se contente de venir s'informer. C'est une technique plus proche de l'inquisition que du journalisme, et qu'elle est loin d'être la seule à appliquer.

Sur le fond, je retiens surtout l'éclaircissement de la position de Zemmour : c'est celle du RPR. Pas des Républicains, non, comme tente de rectifier Léa Salamé, celle du RPR d'avant. Et l'on se souvient d'une émission politique présentée par David Pujadas à la fin de laquelle il présentait à Alain Juppé le programme du RPR à l'aube des années 1990 : à la surprise générale, on y lisait des thèmes, comme celui de l'incompatibilité de l'islam avec la République française, qui avaient depuis été abandonnés au clan lepéniste, et dès lors marqués du sceau de l'infamie. Que Z reprenne ce flambeau n'est pas étonnant, et son électorat théorique, s'il est candidat, devrait mordre à la fois celui des Républicains (voire de LREM) et du Rassemblement National. Après tout, ce serait logique, s'il existe une "niche" au sens darwinien, qu'un homme politique s'employât à l'occuper.

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