samedi 4 décembre 2021

Zemmour au fil des jours - 4 décembre 2021

 04/12/2021

Comme prévu, Valérie Pécresse défendra les Républicains. Éric Ciotti a tout de même recueilli près de 40% des suffrages. Zemmour doit se frotter les mains en entrevoyant une belle réserve de voix pour ce RPR qu'il s'efforce de ressusciter.

"Impossible n'est pas français" sera le slogan de campagne de Zemmour. Je le trouve, comment dirais-je, complètement tarte. Oui, je sais bien, phrase napoléonienne, ancrée dans l'histoire, n'empêche, je retrouve ici le pire d'une tradition franchouillarde qui, loin de servir la cause, l'affuble d'un accoutrement risible. Et puis franchement, l'impossible pas français, dans mon esprit, évoque irrésistiblement l'un des plus redoutables navets des années 70, un truc signé Robert Lamoureux, dont je ne retiens qu'un jeu de mots poussif, "bien malachite ne profite jamais", et la bonne bouille de Jean Lefebvre, plus ahuri que jamais.


Impossible... pas français, film de Robert Lamoureux (1974)
Impossible... pas français, film de Robert Lamoureux (1974)

Ahuri, c'est moi ce matin en entendant sur France Culture une journaliste argentine, Luisa Corradini, décrire en termes cinglants la candidature de Zemmour, sans qu'aucune contradiction lui soit opposée. Je suis allé lire son article original dans La Nación, journal de Buenos Aires (lien). Décidément, la presse internationale ne nous est d'aucune utilité : toutes les idées reçues se retrouvent ici, comme quoi les correspondants étrangers, pour ce que je peux en juger, ne font qu'amplifier la caricature au lieu d'éclairer leurs lecteurs. Ainsi, Zemmour est (pas besoin de traduction) un "fanático anti-musulmán, sólido machista." La charge s'accompagne, il faut le souligner, d'authentiques fake news : "De ahí una de sus últimas provocaciones : exigir que el Estado francés prohíba que las familias inmigrantes pongan nombres extranjeros a sus hijos." (De là vient l'une de ses dernières provocations : exiger que l'État français interdise aux familles immigrées de donner des prénoms étrangers à leurs enfants).

Faux, car ce sujet est ancien, quasiment aussi ancien que la carrière médiatique de Zemmour, qui en parlait il y a dix ans dans Mélancolie française (voir ici), comme devrait le savoir tout journaliste sérieux ; faux encore, il n'a jamais parlé d'appliquer cette mesure aux "familles immigrées", mais à toutes les familles, sans distinction d'origine ; faux, enfin, car son souhait ne concerne que le premier prénom donné aux enfants, comme il s'en est très explicitement expliqué.

La journaliste de La Nación se croit fondée à explorer les "névroses politiques" de Zemmour en les expliquant par ses origines familiales, religieuses et culturelles. Chacun se fera son opinion sur de telles pratiques que je trouve horripilantes et dangereuses - les camps de rééducation ne sont pas loin quand on accuse son adversaire politique de troubles mentaux.

Le reste est à l'avenant, c'est-à-dire de très bas niveau, et l'on soupire en songeant que nos propres correspondants à l'étranger, que ce soit en Argentine, aux États-Unis ou ailleurs, commettent les mêmes types de pseudo-analyses et contribuent au déni du réel autant qu'à la méfiance envers une presse aux ordres ou incapable.

Restons un instant dans les "névroses" de Zemmour avec l'article intéressant, disons, de Dominique Sopo dans Jeune Afrique (à lire ici) dont je ne citerai que ce passage : "En réalité, cet homme dont la revanche sert de phallus et la haine d’aphrodisiaque est avant tout un tract ambulant sur les conséquences néfastes de l’Algérie française et de son effondrement : le racisme colonial, l’exil, la nostalgie, le déclassement."

Avec de tels ennemis, Zemmour n'a plus besoin d'amis.

Article précédent    Article suivant