mardi 16 novembre 2021

Zemmour au fil des jours - 16 novembre 2021

 16/11/2021

Un chemin de saucisson en forme de Z accueille le presque-candidat au salon Made In France, durant lequel Zemmour revêt une marinière qui lui tombe comme une grenouillère. On le voit parti pour Genève, où il n'est pas le bienvenu, avant d'apprendre qu'il s'envolera pour Londres. Je ne sais pas pour vous, mais Zemmour et Londres, ça sonne à mes oreilles comme l'impossible union entre l'huile et le vinaigre, pour reprendre une métaphore ô combien abîmée.

Trafalgar Square, Londres
Trafalgar Square, Londres (DR)

Pour Libération, "Eric Zemmour s’offre les services d’un entrepreneur ultra radical pour sa campagne présidentielle." Radical tout court n'était pas suffisant, trop mou, trop enclin à faire penser à une vétille. Nous avons bien affaire à un ultra radical, comme si ce mot ne désignait pas déjà une forme d'absolu, d'indépassable, de blanc que nulle lessive Omo ne saurait rendre plus blanc. On mettra l'expression sur le compte d'un stagiaire, ou d'un rédacteur soucieux de ne pas laisser planer le moindre doute sur ses intentions vaillamment opposées à la résurgence des thèses hitlériennes. L'article nous apprend qu'il s'agit d'un, je cite, sympathisant de la Nouvelle droite, fils de collabo et proche de sphères néonazies, fin de citation. On ne voit pas trop ce que vient faire "fils de collabo" dans cette énumération - à moins que les enfants soient, pour Libé, responsables des choix de leurs parents - et pour le reste on attendra d'autres études pour savoir s'il s'agit ici d'un n-ième procès en diabolisation échafaudé sur des calembredaines, ou bien si réellement Zemmour mange avec le diable.

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lundi 15 novembre 2021

Zemmour au fil des jours - 15 novembre 2021

 15/11/2021

On assiste, depuis une petite semaine, à une sorte de normalisation du fait zemmourien. Oh, l'homme est toujours là, ses meetings rassemblent une foule tout acquise et, semble-t-il, de plus en plus bruyante, les manifestations de sympathie quant à elles ne s'épuisent pas et les scandales viennent toujours égrener les faits et gestes du "polémiste d'extrême droite", comme disent les journaux.

Mais voilà, ce n'est plus la même chose qu'il y a un mois. Son envolée dans les sondages a cessé net et a même subi un petit recul. La progression de sa chaîne Youtube, 265k abonnés, accuse le pas - il n'y a pas si longtemps, on se disait qu'elle enfoncerait celle de Jean-Luc Mélenchon, mais cette perspective paraît au contraire s'éloigner, l'audience du chef de la France Insoumise sur la plateforme de vidéos atteignant les 600k abonnés.

Marine Le Pen a beau jeu de se poser en candidate respectable et pleine de sagesse, loin des provocations de l'affreux Jojo qu'est devenu Zemmour. Ses phrases, vraies ou trafiquées, sur Pétain, Dreyfus ou les enfants assassinés à Toulouse plombent comme jamais auparavant son image - et il y a fort à parier que ce n'est que le début d'une opposition plus systématique qui jouera pour l'essentiel sur ce ressort. Il devra coltiner ces mots redoutables comme le capitaine Haddock son sparadrap dans l'Affaire Tournesol.

Nouvelle vague à l'horizon ? Ou bien Zemmour à bout de souffle ?
Nouvelle vague à l'horizon ? Ou bien Zemmour à bout de souffle ? (DR)

La magie s'est éteinte. L'effort et la surprise furent si grands, depuis la rentrée, que ses outrances font maintenant partie du décor. Les jours à venir nous diront si Zemmour sera capable d'un nouveau souffle, ou bien si cette période incertaine marque, comme le suggérait un journal, le début de la fin.

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dimanche 14 novembre 2021

Zemmour au fil des jours - 14 novembre 2021

 14/11/2021

Zemmour à Bordeaux. Nouvelles attaques contre les lourdeurs bureaucratiques et les impôts. Je serais le premier à applaudir si le discours était adossé à une vision libérale de la société, perspective qui me semble des plus éloignées, concernant Zemmour. Salle chauffée à blanc, qui ne se surprend même pas d'entendre l'homme citer Gustav Mahler. Logique, après tout, que ce compagnon errant dont le chant plaintif célèbre la terre et ses enfants morts exalte une résurrection.



Scandale (encore un !) autour d'une accusation portée à François Hollande, à la fois à Bordeaux et devant le Bataclan, le 13 novembre. Je cite LCI :

« Eric Zemmour a expliqué, samedi soir, que l'ancien chef de l'État "savait que des terroristes seraient infiltrés parmi les migrants" et qu'il "n’a pas arrêté le flot des migrants". "J'ai simplement dit ce qui est arrivé", a-t-il insisté. "Donc François Hollande ne l’ignorait pas, il n’a pas protégé les Français. Il a pris une décision absolument criminelle de laisser les frontières ouvertes", a ajouté le polémiste, évoquant une "guerre de civilisation" sur le sol français. »

LCI, toujours, rapporte la réponse de l'ancien président :

« "Les propos des extrêmes droites, et notamment les déclarations d'Eric Zemmour, sont à la fois infondées, indécentes et indignes", a répondu François Hollande dimanche matin sur Radio J. "Tous ceux qui sont dans le dévoiement, la dérive, l'hystérisation, la manipulation [...] doivent être mis de côté dans le pacte républicain."

"Les terroristes du 13 novembre sont venus de Belgique, ils sont Belges ou Français", a-t-il souligné, rappelant par ailleurs les mesures prises à l'époque pour "contrôler les arrivées extérieures" à l'Union européenne. "C'est indécent d'être devant le Bataclan, de parler de guerre de civilisation devant le bâtiment lui-même" en reprenant "le langage même des terroristes". Et c'est "indigne parce que ça laisse penser que ceux qui ont dirigé la France sont des criminels", a ajouté François Hollande. »

Réaction de Manuel Valls : « C’est faux, c’est ignoble, c’est inacceptable. Il ne s’agit pas seulement de s’indigner face à de tels propos mais de répliquer point par point aux mensonges distillés par ce personnage dont le seul but est de semer le doute et la haine. »

Raquel Garrido s'indigne que de tels propos « empêchent la réconciliation avec les terroristes. » Eric Naulleau lui répond : « Abjection, votre honneur... »

Chants de la nuit.

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samedi 13 novembre 2021

Zemmour au fil des jours - 13 novembre 2021

 13/11/2021

BFM s'interroge sur le ZemmourCoin. Non, ce n'est pas la nouvelle appellation de Canard WC, mais une "cryptomonnaie des conservateurs", nous dit-on, lancée en pleine vague zemmourienne et voulant profiter de l'engouement autour du futur candidat.

Je trouve un site au nom curieux et un brin inquiétant de zcoin.army qui annonce fièrement : "Détenez du $zCOIN et gagnez un revenu passif en $BNB toutes les 60 minutes." Je veux bien être pendu si j'y comprends quoi que ce soit. Une phrase supplémentaire accentue ma perplexité : "C'est le moment de rendre la pareille aux Patriotes". En quoi ? Comment ? Souscrire à une monnaie virtuelle, l'une de ces multiples tentatives qui foisonnent depuis le succès du Bitcoin, serait ici un geste patriotique ? Et de quelle "pareille" s'agit-il ?

J'avoue ne pas avoir lu les explications fournies dans cette page, qui répondraient sans aucun doute à mes interrogations de novice. Les illustrations sont, disons, spéciales, et font croire à une bizarre parodie, sans que l'on sache très bien ce qui serait alors parodié. On y voit par exemple Z épauler un fusil (souvenir de la visite au Milipol) et mettre en joue la Lune. Pourquoi la Lune ? Qu'a donc commis notre satellite naturel pour se voir ainsi menacé ? S'il y a une référence elle m'échappe complètement. Un compteur actionné par un Chapelier fou donne le temps restant avant le prochain versement de cet énigmatique "revenu passif en $BNB".

Illustration tirée du site zcoin.army
Illustration tirée du site zcoin.army, comprenne qui pourra


Encore deux semaines d'attente : Le Parisien a des informations selon lesquelles Zemmour déclarera sa candidature officielle "à une date comprise entre le 25 et le 30 novembre."

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vendredi 12 novembre 2021

Zemmour au fil des jours - 12 novembre 2021

12/11/2021

Il s'voyait déjà en haut de l'affiche. En dix fois plus gros que n'importe qui son nom s'étalait.

Ça, pour s'étaler ! Deux sondages revoient à la baisse le phénomène Zemmour, doublé par Marine Le Pen qui se qualifierait pour le second tour. Macron accentue sa domination et demeure vainqueur dans tous les cas de figure. "Pour la première fois depuis la rentrée, les intentions de vote en faveur d'Eric Zemmour diminuent", note Jean-Marc Morandini. "Eric Zemmour s'essouffle-t-il ?" s'interroge Closer, qui distingue un "premier coup dur pour le polémiste". BFMTV entrevoit peut-être ici "le début de la fin".

Aznavour : Je m'voyais déjà...
Aznavour : Je m'voyais déjà... (DR)

Douce jubilation des partisans du RN sur l'air d'on vous l'avait bien dit, consternation des zemmouristes incapables de concevoir un Macron toujours aussi haut, et même plus haut qu'il ne l'a jamais été.

Zemmour réagit avec une pointe de mauvaise foi : ces deux instituts de sondage (Elabe et Odoxa), "je ne connaissais même pas." Et s'il ne les connaissait pas, c'est parce qu'il ne pratique que les plus grands, à l'instar des sportifs : "C’est comme en foot, il y a de grands joueurs et de petits joueurs..."

L'éminent décrypteur d'un destin résolument caché au common man devrait se souvenir d'avoir fanfaronné fort imprudemment sur le sort du candidat Jospin, en 1995, et sur le résultat d'une rencontre entre le Brésil et l'Allemagne, deux décennies plus tard. Mais, voyez-vous, d'autres ont réussi avec peu de voix et beaucoup d'argent, moi j'étais trop pur ou trop en avance, mais un jour viendra je leur montrerai que j'ai du talent.

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jeudi 11 novembre 2021

Zemmour au fil des jours - 11 novembre 2021

11/11/2021

Zemmour est-il fasciste ? Je découvre l'éditorial de Riss, "D'un Zemmour l'autre", dans le Charlie Hebdo du 3 novembre dernier. Riss n'est pas seulement un excellent analyste, c'est aussi un homme courageux qui mérite le respect de tous les hommes attachés à la liberté.

Éditorial de Riss : D'un Zemmour l'autre (c) Charlie Hebdo, 3 novembre 2021
Éditorial de Riss : D'un Zemmour l'autre (c) Charlie Hebdo, 3 novembre 2021. Lien

Pour répondre à cette question, Riss met en exergue la pratique révisionniste de l'histoire, explique que Zemmour s'en est fait un chantre pour ce qui touche notamment à la période de l'Occupation, et estime en définitive que l'homme, en utilisant de tels procédés, "répond alors parfaitement aux critères de la pensée fasciste." Ce raisonnement s'achève par une conclusion nuancée : "La question de savoir si Zemmour est un fasciste n’est alors plus aussi incongrue qu’on pouvait le penser au départ."

Ces derniers mots doivent en laisser plus d'un perplexe, car l'on trouve bien des commentaires, dans des journaux moins "stylés" que Charlie, qui ne s'encombrent pas de telles précautions. Pour eux, comme pour la majorité des opposants à Zemmour, la question de son fascisme n'est pas du tout incongrue, elle est tranchée depuis longtemps et ne saurait souffrir la moindre mise en cause.

Cela étant dit j'ai sursauté à plusieurs reprises en lisant cet édito. Riss introduit son discours de la façon suivante : "Il y a à l’extrême droite une caractéristique qu’on ne retrouve quasiment jamais ni à gauche ni dans la droite classique. C’est le révisionnisme."

Puis, il définit ainsi le révisionnisme : "il ne s’agit pas de cette démarche qui consiste pour tout historien à se poser des questions qui peuvent l’amener à « revoir » certaines interprétations d’épisodes historiques à la lumière de découvertes nouvelles. Non, le « révisionnisme », au sens où il est pratiqué par l’extrême droite, consiste à écrire une autre Histoire, en contradiction totale avec les recherches historiques connues".

Le révisionnisme est donc un crime contre la pensée, puisqu'il vise à falsifier la vérité afin de servir une idéologie. Bien. Dès lors, on se demande comment qualifier l'attitude pratiquée par le parti communiste depuis plus d'un siècle, quand il se refuse à reconnaître la cruelle répression des Ukrainiens sous Staline et sa sordide sœur de sang, la grande famine appelée Holodomor, si longtemps oubliées de l'histoire ; le mensonge qui entoura des décennies durant le massacre de Katyń, les carnages de Mao, Castro, Brejnev et de leur clique, et tant d'autres crimes contre l'humanité si abasourdissants que la raison échoue à se les figurer. Les remises au pas de Budapest et de Prague ont été célébrées comme des opérations anti-fascistes. Pourtant, il ne viendrait à l'esprit de personne d'employer ici le mot de révisionnisme pour désigner la propagande qui voulait occulter ces outrages au genre humain.

Nous sommes ici devant un piège sémantique. Pour ces événements aujourd'hui bien décrits par les historiens, à défaut d'être bien connus, nulle "réécriture de l'histoire", mais falsification de l'actualité, au moment même de sa survenance. Le mensonge est noué avec la genèse des faits. La construction de l'histoire est révisionniste, négationniste, ou ce que l'on voudra, car fondée sur la volonté délibérée de travestir la réalité en tant que phénomène observable. Une lecture, ou une relecture, de l'Aveuglement de Christian Jelen - qui n'était pas réputé pour ses sympathies fascistes - nous permettrait, au besoin, de nous en souvenir. Pour le dire autrement, le "révisionnisme de droite" est la déformation d'un passé pourtant bien documenté, alors que le "révisionnisme communiste" est la déformation du présent, qui devient une histoire mal documentée - et, dans bien des cas, présentée dans cette version altérée par des historiens malhonnêtes, lâches ou aveugles.

C'est pourquoi Riss a raison d'écrire que le "révisionnisme" est "pratiqué par l'extrême droite". Le mot et la position politique sont intimement liés, quand bien même il s'agit d'une profonde injustice. Mais il n'a raison qu'en partie. Quand Mélenchon déplore "l'annexion" de la RDA par l'Allemagne de l'Ouest, est-il d'extrême droite ? Françoise Héritier, défendant la thèse stupide d'une différence de taille entre les hommes et les femmes due à une construction sociale, est-elle d'extrême droite ? Ceux qui avancent que  la cinquième symphonie de Beethoven est une marque historique d'exclusion et d'élitisme au détriment des femmes, des LGBTQ+ et des personnes de couleur relèvent-ils de l'ultra-droite ? La revisitation de l'histoire qui fait de Churchill un raciste qu'il faut gommer de nos mémoires est-elle professée par des émules de Mussolini ?

Je me permettrai donc de ne pas suivre le chroniqueur pour qui les pratiques révisionnistes signent le fascisme, sauf à considérer que Mélenchon, Héritier, Black Lives Matter, etc., sont des fascistes (au sens de l'éditorial : posture d'extrême droite ; sinon, la question se pose, effectivement). Je ne le suis pas non plus quand il écrit : "Après la Seconde Guerre mondiale, seuls les partis politiques qui avaient combattu dans la Résistance étaient légitimes pour participer à la vie politique, excluant l’extrême droite, qui fut trop proche de Vichy et de l’occupant." Je trouve cette analyse incomplète. Le PCF a été l'allié des Nazis jusqu'au jour où Hitler attaqua l'URSS. Le sujet est bien documenté (chacun connaît, ou devrait connaître, Le passé d'une illusion, de François Furet, voir aussi cet article parmi tant d'autres). Le renversement d'alliance ne se produisit pas pour des raisons de divergences idéologiques. Pourtant, on trouve des communistes dans le gouvernement de la Libération.

C'est pourquoi il me paraît important d'apporter une nuance de taille à ce passage de l'éditorialiste : "Ces théories, qui disent tout le contraire de ce que les historiens sérieux ont démontré, sont typiques de l’extrême droite qui, depuis 1945 et les sentences du procès de Nuremberg, répète jusqu’à la nausée que l’Histoire est toujours écrite par les vainqueurs, laissant entendre qu’une autre Histoire pourrait être racontée, dont l’objectif est en réalité de réhabiliter son idéologie fasciste." Il n'est pas besoin de vouloir réhabiliter une telle idéologie pour, en effet, estimer que l'histoire, hélas, a bien été écrite par les vainqueurs, et que Nuremberg a perpétué le mythe du communisme ami de l'humanité. Cette illusion encore tenace a été aggravée par l'absence de procès de cette idéologie dans les années 1990. Oui, une autre histoire est possible, et serait à mon avis nécessaire pour enfin rendre justice à la mémoire des peuples d'Europe centrale et d'ailleurs si longtemps opprimés par le grand frère soviétique ou ses cousins orientaux, africains ou latino-américains.

Et Zemmour dans tout ça ? Je suis prêt à entendre qu'il est fasciste - j'ai déjà formulé, me semble-t-il, assez de réserves sur les idées qu'il exprime pour que l'on me prenne au mot. Toutefois les éléments ne me paraissent pas suffisants pour sauter le pas. S'il pose la question de l'innocence de Dreyfus, c'est dans sa volonté de comprendre, dans le contexte de l'époque, la détermination de ne pas affaiblir une France en quête de revanche militaire (je pense que la France s'est au contraire grandie d'avoir réhabilité Dreyfus). Son opinion sur Pétain rejoint celle de Français de l'après-guerre, qui n'étaient pas tous des collabos ou des admirateurs de Rebatet. Il ne m'apparaît pas scandaleux de la défendre : dans ses mémoires Le Voleur dans la maison vide Jean-François Revel raconte avec esprit la passion que mettait le Colonel Rémy à défendre "la droiture" du maréchal Pétain, car "L'objectif final [de De Gaulle et de Pétain] était le même que le nôtre : il s’appelait la libération de la France". Si l'on considère que le Colonel Rémy, compagnon de la Libération et gaulliste de la première heure, était un fasciste, alors les mots n'ont plus de sens.

Il y a donc urgence, si l'on veut continuer à employer ce qualificatif à bon escient, de définir enfin ce qui singularise le fascisme - et en cela l'édito de Riss, bienvenu mais imprécis, ne nous est d'aucune aide.

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mercredi 10 novembre 2021

Zemmour au fil des jours - 10 novembre 2021

10/11/2021

À qui le tour ? La bataille contre la zemmourisation des esprits vient de se trouver une nouvelle cible, Franz-Olivier Giesbert, épinglé pour avoir écrit dans son dernier livre « J’habite Marseille, capitale française du cosmopolitisme, ville monde où je suis heureux et où je me sens chez moi, mais souvent quand je me rends à pied à la gare Saint-Charles en passant par la Canebière, j’ai le cœur serré parce que, pendant le trajet, je n’ai entendu personne ou presque parler français. Que va-t-il arriver à notre langue ? ». Réaction de Laure Adler : « Vous êtes blanc, quoi. Et fier de l’être. » Pour bien faire entendre sa perspective d'humaniste outragée, elle l’interroge : « Il n’y pas assez de blancs autour de vous ? »


Évidemment, ça n'a rien à voir. Giesbert ne parle pas de race, de couleur de peau, ou d'ethnie. Il énonce un constat, et s'en désole. Mais poser un constat est aujourd'hui chose criminelle. Qu'aurait donc voulu entendre Laure Adler ? Que Giesbert ne remarque pas l'abandon de notre langue ? Ou bien, s'il ose le remarquer, qu'il ait la décence de le taire ou, mieux, qu'il s'en félicite ? Ce mini-drame est exactement, à petite échelle, celui du Grand Remplacement, avec les mêmes réflexes outrés qui installent le débat sur un terrain racialiste, avec toutes ses embûches, ses inférences nauséabondes, pour reprendre un adjectif consacré, et l'assurance de voir proclamée sa parenté avec les desseins de la droite extrême.

Des milliers de migrants (j'emploie à contre-cœur ce terme qui est devenu un mot-valise qui recouvre des réalités très diverses : réfugiés, clandestins, demandeurs d'asile...) se pressent en Biélorussie à la frontière avec la Pologne. On voudrait diviser encore un peu plus l'Union européenne, déjà bien falote et inconséquente, que l'on ne s'y prendrait pas autrement. La Pologne proteste, accuse le Kremlin. Que ferait Zemmour président ? Prendrait-il le parti d'une Pologne victime de ce sordide chantage ? Ou bien encouragerait-il la politique de son cher modèle Poutine, en s'asseyant sur l'intérêt des Européens ? Pour ma part, je ne l'imagine pas une seconde dire son fait au despote russe, tant est grande sa complaisance envers Poutine et sa volonté de se concilier les grâces de Moscou pour faire la nique aux Ricains.

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mardi 9 novembre 2021

Zemmour au fil des jours - 9 novembre 2021

 9/11/2021

À peine a-t-il énoncé une mesure à la Zemmour, Arnaud Montebourg se trouve vitupéré de toutes parts, désavoué, même, par les "Jeunes pour Montebourg", association dont le compte Twitter s'est évanoui illico. Pour mémoire, il s'était proposé de bloquer "tous les transferts" d'argent des immigrés, "11 milliards qui passent par Western Union", pour faire pression sur les pays d'origine qui renâcleraient à rapatrier leurs ressortissants turbulents. L'ancien ministre socialiste assure s'être mal exprimé.

Pas sûr que ces vraies-fausses excuses améliorent les scores prévisionnels. Dans le nouveau sondage Harris Interactive, Montebourg stagne à 2% d'intentions de votes. C'est deux fois moins qu'Anne Hidalgo, qui n'est déjà pas très haute, pour rester dans l'euphémisme. Macron reste égal à lui-même, 23%-24%, et Zemmour, pour la première fois, se détache de Marine Le Pen. De 2 à 4 point séparent les deux candidats, toujours en la faveur de Zemmour, qui atteint sa plus haute estimation, 19%, dans l'hypothèse ou Michel Barnier représenterait la droite. Les soutiens remuants de l'homme-qui-ne-laissera-pas-tomber-les-Français-périphériques le clament haut et fort, voici un tournant décisif, devant nos yeux se produit le phénomène qui renvoie à leurs chères études ces journalistes aguerris qui ont si bien analysé le plafond de verre censé bloquer à tout jamais Z à son apogée de 17 points, et voilà que la barrière virtuelle vole en éclats, le candidat-écrivain prend le large et voit sa dauphine Marine s'éloigner inexorablement tandis que s'annonce le plus décisif des duels au sommet.

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lundi 8 novembre 2021

Zemmour au fil des jours - 8 novembre 2021

8/11/2021

"Sondage: Zemmour devance Le Pen, les catégories populaires divisées." Le Figaro note que le candidat-pas-candidat, avec 17%, est pour la première fois au second tour selon le "baromètre IFOP-Fiducial", tout en restant loin de Macron, étonnamment stable à 25%.

"A Colombey, droite et gauche défendent la mémoire de de Gaulle contre l'extrême droite", pour actu-orange.fr. Droite : Christian Jacob, Michel Barnier, Xavier Bertrand, Eric Ciotti, Philippe Juvin et Valérie Pécresse ; Jean Castex (est-il de droite ?), François Bayrou, Nicolas Dupont-Aignan, Florian Philippot. Gauche : Anne Hidalgo, Arnaud Montebourg. Marine Le Pen prévoit un discours à Bayeux. Zemmour refuse d'associer son nom à ce cirque médiatique - une nouvelle façon de se singulariser, lui qui se dit héritier véritable du gaullisme. Du reste on le trouve à applaudir une proposition du néo-gaulliste Montebourg :

"Élection présidentielle 2022 : Arnaud Montebourg veut bloquer les transferts d'argent privé vers les pays refusant de rapatrier les clandestins." Hurlements d'horreur à gauche, roucoulements de plaisir à la croisée des chemins, le parti socialiste coule normalement. C'est dans ce contexte d'une responsabilisation des "pays d'origine" que l'Algérie, si l'on en croit Marianne, interdit définitivement "l’usage du français dans les administrations et dans l’enseignement." Coup de canif dans la francophonie ? Certainement ; à mettre en regard de ces coups de poignards qui cadencent l'actualité du pays. Dernier en date, ce matin, à Cannes, par un Algérien, selon France-Info, voulant blesser ou tuer des policiers. Commentaire lu sous un article : "on se demande comment il ne peut recueillir que 17%".

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dimanche 7 novembre 2021

Zemmour au fil des jours - 7 novembre 2021

 7/11/2021

Le nom du parti zemmourien ne sera finalement pas Vox Populi, si j'interprète bien ce qui a été dit sur BFM. Quel sera-t-il ? Mystère. Et Zemmour sera-t-il candidat ? Évidemment, il ne répond pas et recommande la patience, mais ajoute qu'il "ne laissera pas tomber" les gens très nombreux qui le soutiennent, quoi qu'il entende par là.

"Je suis quand même potentiellement au second tour, qui l'eût cru, il y a seulement un mois et demi ? Soyons honnêtes, personne, même pas moi". Il y a un mois et demi, cela nous mène aux alentours du 23 septembre, et il devenait clair que le phénomène Zemmour s'était durablement installé sur les ondes et dans nos vies, comme je l'écrivais alors.

Éric Zemmour dans "BFM Politique" (7 novembre 2021)

Cette émission inaugure un style jusque-là inédit, si l'on oublie un instant CNews, celui d'une discussion, sinon sereine, du moins au diapason des programmes habituels, sans coups de sang ni anathèmes, entre Zemmour tout disposé à se laisser de temps à autre couper la parole, et des journalistes qui ne se prennent pas pour des procureurs. Et c'est sur BFM ! On croit rêver.

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samedi 6 novembre 2021

Zemmour au fil des jours - 6 novembre 2021

 6/11/2021

Le futur parti de Zemmour s'appellera Vox Populi, annonce l'Internaute. Pourquoi pas. L'appellation colle parfaitement à la démocratie du peuple, pour le peuple, par le peuple, chère à l'homme politique en herbe. Rideau de fumée si l'on en croit l'éditorial du Monde, ramassant en quelques lignes tous les clichés antizemmouriens. Un échantillon ? Les affirmations "scandaleuses" du personnage "flattent les milieux ultranationalistes et la France rance, émoustillés par le spectacle d’une personnalité revendiquant son identité juive, faisant cause commune avec les héritiers du théoricien de l’antisémitisme Charles Maurras."

Article une nouvelle fois écrit avec les pieds (la dernière virgule, dans l'extrait cité, est si malvenue qu'il faut s'y reprendre pour comprendre ce que veut dire l'éditorialiste), prodigue en poncifs (la France "rance", ça va bien une fois, mais à la cinquantième utilisation on classe l'expression dans les recettes faciles du "journalisme sans peine") et volontiers caricatural (Zemmour ne "revendique" pas son "identité juive"). Et l'on déplore un nouvel article à charge qui ne discute pas les paroles exactes de Zemmour, mais leur version simplifiée et forcément mutilée. Il est très inquiétant de voir lâcher la proie pour l'ombre. À force de démonter ce qu'il n'a pas dit, on légitime, par défaut, ce qu'il a réellement dit, et Dieu sait qu'il y aurait matière à discussion. Si l'aventure Zemmour continue, et si l'homme parvient à conserver autour de lui un nombre toujours plus grand de suiveurs, il suffira de se souvenir de ce genre d'articles de presse pour trouver l'une des raisons de cette popularité. Le journaliste croit accomplir une tâche salutaire, mais s'il s'affirme en même temps comme un militant, ses efforts produiront l'exact inverse de l'effet recherché. Ne pas prendre au sérieux les déclarations de Zemmour (les vraies, pas les raccourcis à charge) révèle un parti-pris méprisant ainsi qu'un refus d'accomplir un travail de journaliste : voilà que disparaît alors l'un des piliers de la démocratie, à savoir une presse honnête à même d'éclairer l'électeur.

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vendredi 5 novembre 2021

Zemmour au fil des jours - 5 novembre 2021

5/11/2021

"_ Cette conférence dont je parlais, de M. Renan, en 1883, s'appelle L'islamisme et la science. Et, ensuite il parle de l'islam, parce qu'en fait, jusqu'à il y a trente ans, les deux mots étaient étroitement synonymes. En revanche, je fais une grande différence entre l'islam et les musulmans. Les musulmans peuvent très bien avoir une pratique, une approche, modérée de l'islam, mais comme disait mon vieil ami Malek Chebel malheureusement défunt, dans ce cas-là ils sont modérément musulmans. Et c'est bien ce qu'on a vu avec cette histoire de voile, comment cette pauvre femme s'est faite insulter et menacer de mort parce qu'elle osait prétendre qu'elle avait la liberté d'enlever le voile. En vérité il n'y a pas liberté d'enlever le voile en islam.

_ Si elle est menacée de mort ce n'est pas par l'ensemble des musulmans. Ce sont des islamistes.

_ Ce sont les seuls qui se sont exprimés."

Intéressante passe d'armes hier entre Zemmour et Henri Peña-Ruiz, auteur d'un "dictionnaire amoureux" de la laïcité (j'avoue n'avoir lu aucun de ces "dictionnaires amoureux" qui semblent surgir au sujet de tout et de son contraire ; peut-être l'alliance revendiquée entre le savoir (le dictionnaire) et la passion (amoureux) me laisse-t-elle sceptique, et passablement gêné, sans que j'exclue l'éventualité d'être ici dans l'injustice caractérisée). Je ne sais pas ce que M. Peña-Ruiz a écrit dans son "dictionnaire", mais un article dans Marianne, par lui signé, suscite la méfiance. "Dans une rue commerçante de Drancy (93), Éric Zemmour demande à une femme d’ôter son voile", peut-on y lire. Un lecteur occasionnel pourrait penser que l'horrible Zemmour a pris à partie une passante innocente pour violer sa conscience. C'est pour prévenir ce type de raccourci erroné que j'avais réalisé la transcription de l'échange, me doutant bien des abus auquel il donnerait prise. Le reste de l'article fonctionne sur le même genre d'approximations et de phrases alambiquées que l'on ne s'attendrait pas à trouver sous la plume d'un "agrégé de l'université et docteur en philosophie," je cite : "Embarrassée, la femme veut lui faire comprendre qu’à ses yeux le voile est un simple habit devenu habituel et comparable en cela à la cravate." La suite des événements a démontré au contraire combien ce "simple habit devenu habituel" (Diable !) n'est en rien comparable à la cravate.

M. Peña-Ruiz également à la peine quand il s'agit de démonter les partis-pris de Zemmour. La preuve par l'amalgame avait si souvent servi, et avec des résultats si déplorables, qu'on s'étonne de la voir ainsi brandie en guise d'argument, ce qu'elle n'est ni de près ni de loin. Or hier elle a été dégainée et lancée je ne sais combien de fois à la face de l'auteur de La France n'a pas dit son dernier mot qu'on ne peut s'empêcher de mettre en doute, une fois de plus, la capacité de celui qui l'emploie à formuler une argumentation un tant soit peu construite. L'écharpée finale, qui oppose la vision peña-ruizienne d'un intégrisme également présent parmi les trois grandes religions aux interrogations zemmouristes sur les crimes imputables aux fondamentalistes chrétiens contemporains restera sans doute comme un moment marquant de cette campagne.

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jeudi 4 novembre 2021

Zemmour au fil des jours - 4 novembre 2021

 4/11/2021

Je tombe sur la dernière partie de l'émission Cnews avec Zemmour. Il s'agit d'un débat avec Denis Olivennes. Je ne connais pas ce monsieur qui me paraît avoir du répondant. À Zemmour : "le protectionnisme ce n'est pas courageux". Ça fait du bien d'entendre de telles choses. Oui, la stratégie protectionniste est non seulement lâche mais contre-productive. La réponse aux défis internationaux est une adaptation intelligente à la situation et non un repli artificiel, avec sa conséquence de maintenir sous perfusion des canards désormais boiteux. Le protectionnisme prépare le grand appauvrissement, avance joliment Olivennes.

Éric Zemmour invité de Christine Kelly sur CNews
Éric Zemmour invité de Christine Kelly sur CNews

J'ai déjà remarqué que face à ce genre d'arguments, Zemmour aime renvoyer son interlocuteur à ses supposées lubies, soit "idéologiques", soit "dogmatiques" (le pseudo-candidat, idéologue forcené, voit de l'idéologie partout, même parmi les gens qui récusent précisément toute approche idéologique). Ce soir, nous eûmes droit à "dogmatique". Le libre-échangisme, précise Zemmour, n'a pas que des avantages (en réponse à une affirmation que personne n'avait formulée). Avez-vous vu la souffrance des victimes du chômage de masse ? Ah tiens, voilà que Zemmour, si insensible au sort de foules se faisant massacrer par des tyrans, verse une larme sur les chômeurs.

Olivennes, décidément fort pertinent, met l'accent sur la hausse du niveau de vie permise par la mondialisation, et pointe (pas assez explicitement, le temps lui a manqué) le fait que les emplois "détruits" étaient à vrai dire "transformés", ce qui est la meilleure chose qui puisse arriver. Mimiques de Zemmour, gêné par l'argument qui heurte sa vision hantée par le spectre de Krasucki. Les derniers échanges laissent entrevoir un accord possible, mais rien n'est moins sûr, Zemmour part certainement de trop loin pour évoluer significativement vers une pensée libérale.

Je n'ai pas vu les autres parties de l'émission et ne saurais en parler. Je retiens simplement que Zemmour refuse toujours de dire à Christine Kelly s'il sera candidat, et paraît curieusement emprunté quand le sujet est abordé.

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mercredi 3 novembre 2021

Zemmour au fil des jours - 3 novembre 2021

 3/11/2021

Patatras, le Conseil de l'Europe, affolé par la polémique, a renoncé à sa campagne en faveur du voile islamique. J'entends bien, mais la page présentant le port du hijab comme le summum de la liberté dans un monde inclusif est toujours en ligne, avec ses visuels bien léchés qui côtoient des dessins infantilisants (lien). Si cela se confirme, le message est clair : c'est l'opération de communication qui est suspendue, et non l'action de fond, qui ne relève pas d'un égarement passager. Inquiétante prise de position, par conséquent, de la part d'un organisme dont la Turquie est un État membre (voir www.coe.int/fr/web/about-us/our-member-states).

Comme prévu, Zemmour a réagi sur le sujet avec les mots attendus :


Réaction de Zemmour à la campagne pro-hijab du Conseil de l'Europe
Réaction de Zemmour à la campagne pro-hijab du Conseil de l'Europe. Le tweet d'origine a été supprimé.

Cette critique n'est pas isolée. On la retrouve largement à droite, au centre, un peu à gauche - pas assez en tout cas à mon goût. Rien vu de côté des mélenchonistes et consorts, mais pour en être sûr, il faudrait pouvoir consulter un blog "Mélenchon au fil des jours".

Demain, Zemmour revient sur Cnews pour une émission très spéciale, nous promet-on, de Face à l'Info.

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mardi 2 novembre 2021

Zemmour au fil des jours - 2 novembre 2021

 02/11/2021

Si même le Conseil de l'Europe s'y met... Une campagne pour présenter le port du voile islamique comme une "liberté" fait grand bruit, avec visuels explicites et injonctions déterminées, "Mon voile, mon choix", "Célébrez la diversité et respectez le hijab", "Comme le monde serait ennuyeux si nous avions tous la même apparence", etc. Le Conseil de l'Europe n'est pas l'Union Européenne, certes, mais le logo de l'UE, co-productrice de la campagne, apparaît parfaitement sur ces affiches. Ou comment conforter les partisans de Zemmour dans l'idée que l'Europe se mêle de ce qui ne la regarde pas et s'affirme comme un acteur de ce Grand Remplacement qui, tout en n'existant pas, s'expose au regard de tous via une communication officielle payée avec nos sous.

L'un des visuels du Conseil de l'Europe (lien)

Le sujet qui ressurgit, du côté PCF, est celui de l'inéligibilité d'un homme condamné pour "incitation à la haine". On en parlait déjà début octobre, et voilà que Fabien Roussel veut faire adopter cette mesure à l'Assemblée au début du mois prochain. Les analystes sont sceptiques sur les chances de succès. Une part des commentateurs observe que cette manœuvre cache l'incapacité d'une gauche au plus bas dans les sondages à opposer des arguments à Zemmour. Ce dernier traite Roussel de "communiste d'opérette", "totalitaire dans ses idées et pitoyable dans ses actes", tandis que Mélenchon, au moins, est "un vrai bolchévique à l'ancienne, qui va au contact de l'adversaire". Mouais. Toujours ces comparaisons hasardeuses et à la morale discutable, pour le moins, qui ne font pas honneur à Z. Les horreurs perpétrées par ces  "bolcheviques à l'ancienne" (pour le coup, totalitaires aussi bien dans les idées que dans les actes) devraient pourtant le garder de qualifier ainsi un homme politique, quand bien même il voudrait le flatter. Mais on sait combien Zemmour demeure étanche à ce type de considérations qui ne sont pour lui que sensiblerie mal placée.

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lundi 1 novembre 2021

Zemmour au fil des jours - 1er novembre 2021

 01/11/2021

Zemmour en conférence à Pleurtuit, en Bretagne. Vidéo de plus d'une heure de vingt minutes sur la chaîne officielle. Bigre ! On lance la lecture. Longue introduction élogieuse de l'historien Reynald Secher. Zemmour, debout, main gauche dans la poche, écoute en se dandinant. Il n'est visiblement pas à son aise, on suppose que ses conseillers s'emploieront à donner plus d'aplomb au futur sauveur de la France éternelle. Peut-être lui faudrait-il les services d'un professionnel de la scène, comme Ségolène Royal en avait sollicités ? Au bout de cinq minutes, le journaliste s'installe au pupitre, un meuble transparent (plexiglas ?) surmonté d'un gros micro et supportant, sur son étagère, une petite bouteille de Cristaline.

Zemmour à Pleurtuit
Zemmour à Pleurtuit

Zemmour disserte sur la culture française, se demande s'il ne faudrait pas remplacer le ministère de la Culture par un secrétaire d'État au Patrimoine (pourquoi pas : on se souvient du portrait désopilant et ubuesque qu’Houellebecq faisait des subventions culturelles dans je ne sais plus quel roman - Plateforme ? - et ce n'était hélas pas une caricature), regrette la disparition du sens du beau, rappelle l'aura mondiale de la culture française.

Évidemment, pour balancer ces considérations très recevables, Zemmour tombe une fois de plus dans ses manies exaspérantes. Paris capitale mondiale de l'art en 1900 délogée de son rang à cause la puissance du dollar, maudits Américains, si habiles à faire couler à flots le billet vert pour torpiller ceux qui leur font ombrage, du reste l'indigence culturelle là-bas est bien connue, Charlie Chaplin a tout piqué à Max Linder, comme il se doit, Ernest Hemingway ne serait rien sans Jules Verne, et Elliott Carter n'est qu'un pâle clone d'Erik Satie, cela va sans dire. Il est aussi injuste quand il place la tradition littéraire de notre pays au-dessus de toutes les autres. On pense à un célèbre passage du Silence de la mer, dans lequel Vercors imagine le discours d'un officier allemand :

Il était devant les rayons de la bibliothèque. Ses doigts suivaient les reliures d’une caresse légère.

- « … Balzac, Barrès, Baudelaire, Beaumarchais, Boileau, Buffon… Chateaubriand, Corneille, Descartes, Fénelon, Flaubert… La Fontaine, France, Gautier, Hugo… Quel appel ! » dit-il avec un rire léger et hochant la tête. «  Et je n’en suis qu’à la lettre H !… Ni Molière, ni Rabelais, ni Racine, ni Pascal, ni Stendhal, ni Voltaire, ni Montaigne, ni tous les autres !… » Il continuait de glisser lentement le long des livres, et de temps en temps il laissait échapper un imperceptible « Ha ! », quand, je suppose, il lisait un nom auquel il ne songeait pas. « Les Anglais, reprit-il, on pense aussitôt : Shakespeare. Les Italiens : Dante. L’Espagne : Cervantès. Et nous, tout de suite : Goethe. Après, il faut chercher. Mais si on dit : et la France ? Alors, qui surgit à l’instant ? Molière ? Racine ? Hugo ? Voltaire ? Rabelais ? ou quel autre ? Ils se pressent, ils sont comme une foule à l’entrée d’un théâtre, on ne sait pas qui faire entrer d’abord. » 

Je veux bien, et en me réjouissant de cet hommage si juste à nos gloires littéraires, je me dis aussi que nous aurions grand tort d'oublier les écrivains britanniques qui ont tant enrichi la culture universelle au fil des siècles. La seule existence de Swift, Defoe, Dickens, Kipling, Stevenson, Wells et tant d'autres, dément l'idée reçue d'un art dont seul Shakespeare serait l'immense représentant.

Cela étant dit je veux prendre Zemmour au mot : la culture française est éminemment respectable ? Sans aucun doute ; aussi j'attends de savoir lequel de nos grands compositeurs sera choisi pour accompagner ses futures sorties. J'ai déjà avancé l'idée, début septembre, et j'insiste. Ce choix dira assez bien en quelle mesure son engagement est sincère et fondé sur un amour authentique de notre patrimoine. Rameau, Berlioz, Bizet, Ravel, Roussel, le choix ne manque pas, M. Zemmour, et il n'appartient qu'à vous de mettre en cohérence vos propos et vos actions.

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dimanche 31 octobre 2021

Zemmour au fil des jours - 31 octobre 2021

 31/10/2021

Raciste, négationniste, xénophobe, antisémite, islamophobe, facho, virus. Aujourd’hui, Anne Hidalgo vient d'ajouter une nouvelle entrée à la Norme des injures qu'il est possible d'adresser à Zemmour : guignol.

"J’en appelle à ce que cette élection présidentielle soit une vraie élection avec un vrai débat et pas une candidature d’un guignol. C’est un guignol qui est en train de porter notre pays vers une situation qui ne correspond en rien à ses valeurs. Je veux que le débat de cette élection porte véritablement sur la vie des Françaises et des Français". Ce n'est pas tout : elle déplore que "Zemmour occupe l’espace médiatique de manière éhontée" et appelle le CSA à la rescousse.

Anne Hidalgo traite Éric Zemmour de Guignol : quelques titres
Anne Hidalgo traite Éric Zemmour de Guignol : quelques titres

Il est difficile de parler d'Anne Hidalgo sans tirer sur l'ambulance. Je m'étais ici affligé du manque de naturel de Zemmour dans ses premières vidéos, je dois maintenant reconnaître qu'avec Mme Hidalgo nous sommes mis en présence d'un nouveau sommet, tant elle paraît "fausse" et son discours emprunté. Je le dis sans plaisir. Un candidat de la gauche sociale-démocrate responsable, crédible, intelligent, fait cruellement défaut, tant l'actuelle maire de Paris semble loin de ce portrait. Ses interventions rappellent, d'une certaine façon, les pires prestations de Ségolène Royale. Les sondages placent Mme Hidalgo autour des 5%. C'est misérable, d'autant plus qu'on ne la voit guère "renverser la table" pour donner un nouveau souffle à une campagne déjà à la peine.

Le CSA, pour mémoire, a déjà sévi en provoquant l'éviction de Zemmour de l'émission Face à l'Info. Si le but était de supprimer l'homme de notre actualité, l'échec est total. Nous l'avons déjà dit, toutes les nouvelles mènent à Zemmour, et l'on ne saurait concevoir une discussion sur la sécurité, l'islamisme, le futur de notre pays ou d'autres sujets sensibles sans évoquer ses idées, fût-ce pour s'efforcer de les combattre.

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samedi 30 octobre 2021

Zemmour au fil des jours - 30 octobre 2021

 30/10/2021

« Monsieur Zemmour n'est pas antisémite », pour la bonne raison qu'il « reproduit beaucoup de scénarios culturels liés au judaïsme », a déclaré Jean-Luc Mélenchon sur BFM. Quels sont ces scénarios culturels ? « On change rien à la tradition, rejet de la créolisation. » Ce ne sont pas des considérations nécessairement négatives, car « tout cela a son mérite, car ça lui a permis de survivre dans l'histoire. » Face à la mini-tempête soulevée par ces propros, le chef de la France Insoumise a admis s'être « mal exprimé. »

La mini-tempête en question, à bien y regarder, a eu deux causes. La première : le soupçon d'antisémitisme, pour avoir lié la judéité supposée de Zemmour à sa position politique. La seconde, celle d'oser affirmer que Zemmour n'était pas un antisémite. Cette dernière déclaration offusque le front anti-Zemmour pour qui l'antisémitisme du chroniqueur ne fait aucun doute.

J'ai déjà écrit ici combien je suis mal à l'aise sur ces sujets d'une religion, ou d'une tradition, prêtée à Zemmour, sans que l'on puisse trouver de lien entre cet héritage et les propos du futur candidat. Hélas pour moi, le sujet d'un « vote juif » et son corollaire, « un Juif ne devrait pas dire ça », s'est invité dans le débat. Le grand rabbin de France Haïm Korsia a déclaré sur que Zemmour était « antisémite certainement, raciste évidemment. » Pour le président du CRIF Francis Kalifat, « pas une voix juive ne doit aller au candidat potentiel Éric Zemmour. » Anne Sinclair aurait déclaré il y a quelques semaines : « Je veux dire ma honte qu’une partie infime de la communauté suit Éric Zemmour. J’ai honte. »

Je ressens pour ma part une profonde honte devant un tel spectacle. Je ne trouve pas de racisme dans les propos de Zemmour, qui milite précisément pour l'assimilation de tout être humain, quelle que soit son origine ou la couleur de sa peau. Le concept de racisme, il est vrai, change de sens selon celui qui l'invoque, et aucun accord sur ce point ne pourra être trouvé si l'on ne s'appuie pas avant toute discussion sur une définition commune. Je ne pense pas avoir jamais entendu Zemmour tenir des propos antisémites. Sa lecture des basses œuvres du régime de Vichy ne relève pas de cette catégorie, mais d'une vision historique à laquelle il faut opposer des arguments tout aussi historiques (je note qu'un historien franco-israélien, Alain Michel, partage l'approche de Zemmour. Je ne sais pas si cela a valu à ce chercheur installé en Israël d'être traité d'antisémite.)

Meeting de Zemmour à Nantes
(c) Le Parisien lien

Nouvelle du jour, les antifas et leurs camarades d'extrême gauche ont protesté contre la venue de Zemmour à Nantes en provoquant divers troubles et en attaquant une voiture de police. L'un des slogans était, nous dit Le Parisien, « Zemmour à mort, à mort les fachos. » Peut-être la police devrait-elle laisser Zemmour et ses partisans se faire exterminer, pour garantir la paix civile ? Comble du désir mimétique, cette manie de vouloir massacrer les opposants prend tous les atours du fascisme.

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vendredi 29 octobre 2021

Zemmour au fil des jours - 29 octobre 2021

 29/10/2021

Les manifs anti-Zemmour des antifas signalent, d'une part, un amour immodéré de l'apocope, d'autre part la persistance par-delà les âges des vieilles recettes du Komintern. Si un antifa manifeste, l'objet de son courroux, automatiquement, est un fa. Nul besoin de définir plus loin ce qui se cache derrière ce fa que l'on a créé en creux, par la seule vertu de l'existence de ses opposants. À une autre époque, ce passe-partout sémantique et gratifiant m'aurait enchanté. Hélas, un siècle d'enseignements, à peu près, nous mettent en garde contre les discours bienveillants servant de rideau de fumée aux plus sordides politiques - plus sordides encore que celles de ces fa que l'on entendait combattre.

Il y a certes des raisons de s'inquiéter. Le tumulte des antifas intimide des élus susceptibles d'accueillir Zemmour, qui a vu son portrait transformé en cible dans une rue de Nantes. Que cela soit un appel au meurtre ou une blague idiote, l'effet immédiat est de maintenir les feux sur le non-candidat et de convaincre encore plus ses partisans que Zemmour, ce Prométhée contemporain, est dans la mire de tous ceux qui veulent se payer celui qui porte la lumière dans les ténèbres.

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jeudi 28 octobre 2021

Zemmour au fil des jours - 28 octobre 2021

 28/10/2021

"Pauvre Marine Le Pen, je la plains. Je la plains de devoir parler comme Marlène Schiappa, comme la gauche, de parler comme les féministes. Mais vous savez, j’avais été le premier à le dire et à la diagnostiquer : c’est une femme de gauche, tous ses réflexes sont de gauche. Elle est en décalage avec son électorat."

Quand Zemmour présente Marine Le Pen comme une femme de gauche, il veut dire que son comportement reprend ceux de la gauche actuelle. C'est exact, du moins en partie, quand on pense que les sorties de la présidente du RN ne prennent plus pour cible une certaine immigration, comme c'était le cas à une époque, et qu'elle s'était donnée pour consigne de ne pas parler de "grand remplacement". Du reste elle demeure une étatiste convaincue, comme les camarades insoumis ou assimilés. Il n'en reste pas moins que ces différentes positions sont largement partagées à gauche, à droite et au centre. Alors, parler de "la gauche" dans ces conditions est délicat.

L'un des marqueurs historiques entre "gauche" et "droite" était la façon de considérer les influences respectives de l'inné et de l'acquis. Pour la droite, l'inné primait (l'hérédité, les grandes familles, bon sang ne saurait mentir, les chiens ne font pas des chats, etc.). L'acquis, pour la gauche, était la valeur déterminante, chacun étant en mesure de s'élever par l'exercice de la raison, nonobstant ses origines biologiques.

Ce sempiternel débat s'est évaporé dans un tourbillon échevelé. Le combat pour l'acquis, aujourd'hui, s'incarne dans le mouvement woke (et compagnie) avec son engagement pour la fluidité généralisée, y compris celle des sexes : tout est acquis, tout est choix personnel, sauf le "statut racial" qui fait de vous une victime, en qualité de descendant supposé de victimes, ou un bourreau, pour la même invraisemblable raison. Si l'on décide de voir ici le nouveau clivage gauche-droite, il ne fait alors aucun doute que nous trouvons d'un côté les Verts, partisans de ce relativisme exalté, et de l’autre Zemmour, résolument opposé à cette folie venue d'outre-Atlantique. Entre les deux, toutes les nuances de gris.

Il est paradoxal que Zemmour défende les chances de tous en voulant mettre fin aux quotas censés combattre les discriminations, quand ses opposants "progressistes" voudraient au contraire renforcer de tels privilèges. Paradoxal, car ici c'est Zemmour qui tient un authentique discours de gauche dans cette drôle de guerre à fronts renversés.

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mercredi 27 octobre 2021

Zemmour au fil des jours - 27 octobre 2021

 27/10/2021

L’histoire retiendra que Zemmour a réussi à se placer, lui et ses thèmes, au beau milieu du jeu politique. Voilà qu'il sort de sa manche la carte du permis à points, qu'il faudrait supprimer ; et tout le monde d'exposer son avis, ses témoignages, son vécu, ses déboires, de narrer par le menu sa poignante saga dans laquelle on s'est fait retoquer, voyez la chose dans l'injustice de son horreur, pour une vitesse d'un malheureux kilomètre-heure en trop sur une route droite et large comme une piste d'envol où nul danger ne saurait se blottir, autour de ce damné permis à points dont, assure-t-on en passant, quelques juristes viennent de s'aviser qu'il serait peut-être hors la loi.

Marine Le Pen se rend en Hongrie et se vante d'être reçue avec plus d'honneurs que le chroniqueur, ce qui est sans doute vrai, mais bon, sa visite succède à celle de Zemmour et s'apparente à un jeu d'imitation. Emmanuel Macron, lui, se fait un spécialiste du poil à gratter là où ça fait mal. Après la commémoration du 17 octobre 1961, voilà qu'il annonce restituer des œuvres d'art au Bénin, histoire de « redonner à la jeunesse africaine accès à son patrimoine ». Face à une assemblée de protestants, il parle d'un récit « commun [...] enrichi par toutes les religions » ; ce récit, cela va de soi, « prétend chaque seconde à l’universel » et « n’est pas réductible à une identité figée ». Il serait injuste de penser que ces événements, vraisemblablement prévus de longue date, sont dictés par le combat contre les idées de Zemmour, mais l'important est ailleurs : chacun pense à Zemmour quand Macron s'exprime ou quand Marine Le Pen se rend à Budapest.

Récemment, notre président a inauguré le « musée Dreyfus » en appellant « à ne pas oublier ». Dreyfus, comme Pétain, comme Papon, sont des sujets qui « marquent » la pensée de Zemmour, et qui « marquent » aussi la frontière avec l'inacceptable. On touche ici aux tabous. Le président le sait bien et ne se prive pas de jouer ses atouts face à un Zemmour, sur ces sujets, parfois désinvolte, trop expéditif, dans sa dangereuse manie d'idéologiser notre histoire, qu'il traîne comme d'indécentes scories.

Côté sondage, aucun bouleversement, Macron en tête avec 23%-25%, Zemmour et Le Pen derrière dans l'intervalle 16%-18%. Z, disent les analystes, aurait atteint son plafond, il ne progresse plus, d'où son geste envers les « classes populaires » et la mise en lumière du permis à points, ce symbole de l'iniquité généralisée dont la France périphérique est la victime.

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mardi 26 octobre 2021

Zemmour au fil des jours - 26 octobre 2021

26/10/2021

On se demande combien gagnent les scénaristes de Netflix, Canal +, Disney, etc., pour nous pondre des histoires souvent indigentes aux dialogues mille fois entendus, quand on découvre la séquence qui mit hier, en direct, Eric Zemmour en position de dialoguer avec une femme voilée. Contenu explosif, apparemment, puisque le tweet annonçant l'extrait a été retiré presto par Cnews, et que la vidéo elle-même a, dit-on, disparu de Youtube. Je ne sais pas ce qu'il en est mais je l'ai trouvée il est vrai sur Dailymotion - ci-dessous - sans aucune garantie qu'elle fonctionne. Gardons-nous des sortilèges de l'image : le verbatim du dialogue permet, je pense, de mieux comprendre encore par quels détours est passée la discussion et de quelle manière le dialogue parfois vif s'est déroulé. Un dialogue, je le répète, qu'aucun cinéaste n'aurait osé imaginer, et surtout pas présenter sous la forme qui suit.



Jean-Marc Morandini Je voudrais savoir, Rachida, pourquoi vous portez le voile ?

Rachida Bonjour monsieur Zemmour, bonjour monsieur Morandini. Si je porte le voile aujourd'hui, c'est parce que j'ai choisi de le porter. Je le porte depuis peu, mais c'est vraiment parce que mon cœur, ma foi, m'a dicté, m'a guidé vers ce voile, vers ma confession qui est musulmane. Pourtant je suis française, mais j'ai ma petite religion, qui est très grande, et que je respecte, comme toutes les autres religions. Ce voile, ce bout de tissu que je porte sur la tête, fait de moi la femme que je suis, et je ne changerai pas.

JMM Est-ce que ça vous choque, Eric Zemmour, de voir Rachida dans la rue, comme ça, avec le voile ?

Zemmour Oui. Et je vais lui dire pourquoi.

R Dites-moi.

Z D'abord, si vous voulez, est-ce que vous imaginez, à la Mecque, une jeune femme en minijupe ?

R Je ne suis pas à la Mecque.

Z Par respect pour la Mecque, elle ne mettrait pas une minijupe.

R Comment pouvez-vous comparer la France...

Z Ah mais la France pour moi est sacrée. Ça c'est une première chose.

R Oui, mais comment pouvez-vous parler de la France...

Z (en même temps) Donc par respect... en France...

Z Vous savez, il y a un vieil adage en France, qui dit "à Rome, fais comme les Romains".

R D'accord.

Z Donc à Rome on fait comme les Romains. Au Maroc, on fait comme les Marocains.

R Mais je fais, je suis française, je travaille...

Z (en même temps) Non, non, madame, vous ne faites pas comme les Français

R ... je travaille, je paye mes impôts, j'éduque mes enfants

Z Mais ça...

R ... mes enfants vont à l'école, je travaille, j'ai toujours travaillé, ça fait vingt ans que je travaille...

Z Chère madame...

R ... j'ai toujours respecté mes frères, mes sœurs, mes cousins, mes voisins, mes amis, mes collègues, mes patrons...

Z Chère madame...

R Je les ai toujours respectés.

Z Ça, vous le... je peux parler ?

R Et ce bout de tissu, M. Zemmour, excusez-moi, ce bout de tissu M. Zemmour, ne fait pas une personne, je suis une femme. Voyez la femme que je suis, ne voyez pas le tissu que je porte sur la tête.

Z Moi je ne vois que le tissu que vous avez sur la tête. Parce que vous, vous ne montrez que ça. Voilà. Quand vous êtes dans l'espace public, qu'est-ce que vous... laissez-moi répondre.

R Oui, je vous laisse parler.

Z ... vous montrez votre tissu. Donc vous dites à tout le monde : "je suis musulmane".

R Non.

Z La France... bien sûr que si ! La France, vous savez, c'est la laïcité. On n'est pas dans un pays arabo-musulman.

R Mais justement ! C'est un pays laïc !

Z Laissez-moi finir. Laissez-moi finir. Laïc, qu'est que ça veut dire ? Ça veut dire, d'une part, la liberté religieuse, mais ça veut dire aussi, madame, le devoir de discrétion. Ça veut dire que dans l'espace public, on ne dit pas à tout le monde "vous voyez, je suis musulmane". Non ! On dit  "je suis français". Je finis. Vous savez, madame, quand vous dites...

R Un bout de tissu.

Z Un bout de tissu qui veut dire tout !

R Non.

Z Madame, le vêtement est éminemment politique. Et je vais vous dire quelque chose : vous savez, vous dites, "c'est moi qui l'ai voulu, c'est ma foi, etc."

R Oui.

Z Bon. Vous savez très bien que l'islam ne repose pas exclusivement sur la foi, qu'il y a des injonctions très strictes, très précises...

R Ni sur un bout de tissu.

Z Ni sur un bout de tissu. Très strictes, et qui avant tout relèvent du contrôle social. Donc en vérité, il y a antithèse, antinomie, entre la liberté individuelle que vous revendiquez, et l'islam qui est une religion qui ne connaît pas la liberté individuelle, puisque islam veut dire soumission.

R Non.

Z Donc quand vous nous dites...

R Non.

Z Ah si madame, islam veut dire soumission.

R Non.

Z Qu'est-ce que ça veut dire ?

R Soumission, ça veut dire qu'il faut que je demande l'autorisation à mon mari, pour que je...

Z Non, non, non, non. Vous demandez l'autorisation au texte.

R Non !

Z Vous demandez l'autorisation au texte.

R Je suis une femme libre.

Z (en même temps) c'est le texte qui vous commande.

Z Non, madame. Vous n'êtes pas libre, non.

R Libre. Et c'est ce que j'inculque...

Z (en même temps) ça n'existe pas en islam

R C'est ce que j'inculque et ce que je dis à mes enfants. C'est la liberté. Nous sommes en France.

Z Madame...

R Liberté, égalité, fraternité, monsieur Zemmour. Respectez uniquement la liberté. Respectez la femme que je suis, non pas le foulard que je porte. Juste la femme que je suis.

Z Alors enlevez-le si ce foulard n'a pas d'importance !

R Enlevez votre cravate à ce moment-là !

Z Mais je l'enlève quand vous voulez.

R Mais moi aussi.

Z Mais la cravate n'est pas un (inaudible)

JMM Allons-y ! Allons-y !

Z Mais la cravate, madame... mais la cravate...

R Enlevez votre cravate, j'enlève mon tissu !

Z Alors très bien.

(il passe le micro à JMM et commence à dénouer sa cravate. Ce faisant :)

Z Et je signale que la cravate n'est pas un élément religieux. Et que donc elle ne signale rien de la religion.

R Le foulard non plus...

Z, sans cravate et le col relevé : Allez-y madame !

R Le foulard c'est la foi, c'est ce que l'on porte en nous.

Z Non, non. C'est l'injonction religieuse. Ce n'est pas la foi, madame. En islam... j'attends toujours que vous enleviez votre foulard. Allez-y, je vous en prie.

R Oui, je vais l'enlever. Et vous allez me respecter pour autant ?

Z Mais bien sûr.

R Ah, d'accord. (elle commence à défaire son foulard) Alors, tissu ou pas tissu, c'est le respect qu'on cherche.

Z C'est une évidence.

R On est d'accord.

Z On est d'accord.

R La liberté.

Z Non.

R (en détachant les syllabes) Je choisis de le porter, je choisis de le retirer.

Z (en même temps) Madame... C'est faux, madame.

R On va rien (inaudible) imposer...

JMM Laissons-la retirer, laissons-la retirer.

Z Je vous en prie.

R Personne ne m'imposera quoi...

Z Je vous en prie.

R Je décide, faut bien l'entendre, hein, je décide de l'enlever.

JMM Et vous décidez de l'enlever, voilà.

Z Très bien.

R Voilà

Z Très bien. Non, vous ne l'enlevez pas, là, voilà, très bien.

(R est maintenant tête nue. On entend des hommes crier quelque chose dans la rue)

R, regardant Z : Alors ?

Z Très bien, alors vous voyez, là, là, vous respectez la laïcité.

R Non, non, non, je me respecte moi-même.

Z Non, madame. Non, madame.

(ils parlent en même temps)

R Sachez une chose : le foulard ne fait pas la religion. Non, le foulard ne fait pas la religion.

Z Je suis d'accord avec vous.

R Comme votre cravate, ça ne vous donne pas plus d'intelligence ?

Z Ah, absolument d'accord. On est d'accord. Mais ça n'a rien à voir.

JMM Est-ce qu'aujourd'hui, sans foulard, là, maintenant que vous avez enlevé le foulard à la demande d'Eric Zemmour...

Z Ah non, pas à la demande, pas à la demande.

R Pas à la demande. J'ai décidé de le retirer.

JMM Bon, enfin, c'est un échange. Vous avez décidé de le retirer, je suis d'accord. Est-ce que vous vous sentez différente, sans foulard ?

R Non ! Non !

Z Alors pourquoi vous le mettez ?

R Parce que j'ai décidé de le porter !

Z C'est faux, madame.

R Parce que c'est ma foi, monsieur.

JMM Eric Zemmour, le fait qu'elle l'ait enlevé, qu'elle a enlevé son foulard, ça prouve que c'est une femme libre.

Z Mais...

R Mais oui !

Z Chère madame. Je vous rép... Oui bien sûr c'est très bien, je vous remercie. Ce que je veux dire - vous voyez, vous le remettez !

R Vous pouvez remettre votre cravate aussi.

Z Mais je vous en prie. Moi je vous répète que ce n'est pas un signe religieux.

R Ce n'est pas un signe religieux...

Z Non.

R Même le foulard.

Z Si.

R Non.

Z Ben pourquoi vous le remettez alors ?

R Vous voyez !

Z Puisque vous dites que c'est la foi. Madame...

R Vous avez juste vu les cheveux en plus, sinon c'est la même femme qui est en face de vous, monsieur Zemmour, vous avez la même personne.

Z Vous vous contredisez.

R Vous avez la même personne en face de vous.

Z Vous vous contredisez.

R Vous avez vu, je n'ai pas changé.

JMM Attendez, attendez.

Z Si vous ne me laissez pas parler, on ne peut pas discuter. Vous vous contredisez. Vous dites que c'est un acte de liberté, et après vous dites que ce n'est pas un signe religieux. Faudrait savoir. Pourquoi vous le mettez si ce n'est pas un signe religieux ? C'est évidemment un signe religieux.

R Non.

Z Et c'est évidemment écrit dans le Coran. Et vous respectez le Coran. Vous n'êtes pas libre, car en islam il n'y a pas de liberté individuelle.

R Monsieur Zemmour...

JMM On va essayer d'avancer un petit peu. Attendez, je vous redonne la parole dans un instant. (à Zemmour) La kippa vous gêne de la même façon ?

Z Oui. Moi, vous savez, quand j'étais enfant...

JMM Donc vous êtes pour qu'il n'y ait plus de kippas non plus dans la rue.

Z Absolument. Quand j'étais enfant, moi, je suis de confession juive, tout le monde le sait, quand j'étais enfant j'habitais là et on allait parfois à la synagogue. Et on mettait la calotte - on appelait ça calotte, d'ailleurs, en français - on mettait la calotte dans la synagogue, évidemment. Et dès que je sortais de la synagogue, ma mère me disait : "tu mets ça dans ta poche". Pourquoi ? Parce que elle, elle respectait la laïcité. La religion, c'est dans le privé. Ce n'est pas dans le public, dans l’espace public, et je vais vous dire pourquoi. Est-ce que vous savez pourquoi on ne met pas la religion dans l’espace public ? Parce que sinon, il ne peut pas y avoir de débat démocratique. Je m'explique. Si entre nous on peut discuter, voyez, sauf que à partir d'un certain moment vous allez me dire "c'est ma foi", donc on ne peut plus discuter, parce qu’il y a Dieu qui vient. Donc on sort Dieu du débat démocratique. Et dans l'espa...

JMM Elle n'a pas évoqué Dieu.

Z Si, si ! Elle a dit "c'est ma foi" !

R Oui !

Z La foi, c'est Dieu.

JMM Ça ne vous empêche pas de parler, Eric Zemmour.

Z Bien sûr. Mais ça nous empêche d'avoir un débat à égalité. Elle, elle est portée par la foi de Dieu.

R Je vous considère comme tout homme...

Z Vous ne comprenez pas ce que je dis.

R Juste, comme je vous dis, je suis une femme, vous discutez avec une femme, là, pas avec une musulmane. Vous parlez avec une femme...

Z Non !

R On est d'accord.

Z Non madame.

R Je suis de confession...

Z Vous ne pouvez pas, vous ne pouvez pas...

R Vous êtes juif, ce n'est pas écrit sur votre front  

Z Justement, ce n'est pas écrit sur mon front, vous, c'est écrit sur votre front.

Fin de la transcription.

Ce dialogue a quelque chose que je trouve passionnant, tout simplement parce que c'est un dialogue. Pas d'invectives. Pas d'entourloupe. Pour Rachida, son foulard n'est qu'un bout de tissu, comme elle le répète, et faire toute une histoire pour ce morceau d'étoffe, nous dit-elle, ne servirait qu'une querelle bien vaine. Pourquoi lui chercher noise de vouloir ainsi honorer sa foi ? Du reste, cette pièce de vêtement est, selon elle, tout aussi anodine que la cravate que porte Zemmour.

Pour Zemmour, ce n'est pas un bout de tissu. C'est un signe distinctif : celui de l'allégeance à une religion. Son affichage public contrevient à la laïcité, et ne saurait dès lors prétendre à la neutralité. De plus, cette religion étant pour lui liberticide, à cause des multiples contraintes qu'elle fait peser sur ses fidèles, il ne saurait être question d'accepter le voile au nom de la liberté.

L'échange de bons procédés - l'homme retire sa cravate, la femme son foulard - est un jeu de dupes. Se défaire d'une cravate ne prête à aucune conséquence. Je n'ai pas vu des fanatiques de Monsieur de Fursac ou de Hugo Boss se fendre d'appels à la haine contre le sacrilège commis par Zemmour et exiger qu'on étranglât le drôle avec un nœud Windsor.

Rachida, elle, a reçu des menaces de mort. Celle qui voulait prouver sa liberté en même temps que sa foi subit la vindicte d'excités pour qui le retrait de ce bout de tissu est tout sauf bénin, preuve que la portée symbolique du foulard dépasse celle d'un simple vêtement. Les femmes courageuses, en Iran ou ailleurs, nous disent exactement la même chose. Retirer le voile est une liberté ? Sans aucun doute. Ceux qui en parlent le mieux sont des anciens musulmans, des apostats, qui s'efforcent d'attirer notre attention sur les manœuvres des Frères musulmans, ou autres organisations similaires, occupés à grignoter petit à petit notre société par des petites concessions sur des aspects apparemment anodins qui sont pour eux autant de victoires.

Dans le cas présent, le cours des événements, on le voit, sert davantage la cause de Zemmour que celle de Rachida, obligée de se garder de ses coreligionnaires outrés par le geste d'une femme se croyant libre ; le futur candidat se trompe lourdement, toutefois, quand il néglige cette tendance profonde qui pousse l'homme libre à préférer, plébisciter parfois, la tyrannie. Jean-François Revel avait consacré un essai éblouissant à cette tentation totalitaire - c'est le titre de l'ouvrage - qui scandalisa tant les "bien-pensants" de l'époque. Plus d'une décennie avant le livre de Fukuyama, il apportait déjà un démenti à la perspective d'une fin de l'histoire. Nous aurions tort de l'oublier et de considérer que les femmes choisissant d'arborer un symbole de soumission le font contre leur gré.

PS - je trouve la vidéo de l'émission entière sur la chaîne de Zemmour. La voici.

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lundi 25 octobre 2021

Zemmour au fil des jours - 25 octobre 2021

 25/10/2021

Titres en vrac : Creil rend hommage à Shaïna, adolescente enceinte brûlée vive en 2019. Toulouse. Un homme armé d'un couteau menace des pompiers venus lui porter secours. L'A13 fermée entre Paris et St-Cloud après un vol de câbles. Il tente de stopper un "rodéo urbain" dans sa commune, un maire du Calvados reçoit un coup de matraque. Toulouse : la maison d'un retraité squattée pour la troisième fois. Colombes : des policiers abattent un homme qui les menaçait d'un couteau. Il poursuit ses agresseurs et reçoit cinq coups de couteau. Un jeune homme grièvement blessé par des individus armés de sabres à Roubaix. Bordeaux : une voiture fonce sur des CRS, les policiers ouvrent le feu et blessent un homme. Toulouse. Il blesse sa victime au couteau, s'enfuit et chute de 10 mètres sur les quais de la Garonne. Armé de deux couteaux, l’individu qui menaçait des policiers à Montrouge sort libre du tribunal.

Un dernier : Changement d'heure : quand aura lieu le passage à l'heure d'hiver ?

On serait tenté de répondre que l'hiver est déjà là, et que l'heure véritable risque bien d'être la 25e, l'heure de la déshumanisation. Le temps est-il venu où rien ne peut plus être rattrapé, qui voit le néant blafard, avec sa gueule de raie, happer nos lendemains pour les entraîner dans d'insondables abysses ? Le monde s'est défait sous nos yeux et gît en un fatras désolé. Notre civilisation : un grand cadavre à la renverse ; le seul qui entend s'insurger porte en lui d'autres menaces, tout aussi démesurées, pire encore que la nuée portant l'orage. L'espérance fuit l'homme, comme une symphonie qui s'éloigne.

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dimanche 24 octobre 2021

Zemmour au fil des jours - 24 octobre 2021

 24/10/2021

Au Grand Jury RTL, Zemmour égal à lui-même. Un journaliste l'attaque : "Vous divisez la société".

Zemmour réplique : "Oui. Je la divise entre Français et étrangers". Osé, direct et sans artifice. Sa façon de répondre brise les standards de l'interview politique et favorise sans contredit sa popularité. Beaucoup s'effrayent de le voir ainsi faire glisser la fenêtre d'Overton, pour reprendre une tarte à la crème de la politicosphère. Il est moins convaincant, cependant, en prônant la fin du permis à points. J'avoue être surpris par cette sortie démagogique, et m'attends à voir invité sur les plateaux TV le routier Tarzan qui avait fait trembler le gouvernement en 92 ou 93. L'un des interviewers a eu son scoop en direct, Zemmour a pris sa décision, même s’il la garde pour lui, oui, la résolution que tout le monde attend a bien été arrêtée et sera bientôt dévoilée. Cela ne change absolument rien, mais le journaliste était content de lui.

Juste avant Zemmour, Alain Finkielkraut intervenait sur Cnews. Je regrette que la parole de ce philosophe soit si rare - heureusement, nous avons ses livres - tant son analyse est judicieuse. Au sujet du non-candidat auquel tout le monde pense :

"Zemmour prend en charge l'angoisse existentielle d'un nombre grandissant de Français qui se demandent si la France va rester la France, si leur droit à la continuité historique sera enfin respecté ou continuera d'être bafoué. C'est la raison de son succès et ce n'est pas en l'insultant qu'on pourra en finir avec lui. [...] Zemmour a le mérite de mettre la question de la France, la France que nous voulons, au cœur du débat de l’élection présidentielle."

Oui, c'est son mérite, son très grand mérite, et l'on sait gré à l'essayiste de le noter, d'autant plus qu'il explique également son très profond désaccord avec Zemmour :

"Là où je suis en désaccord avec Zemmour, c'est que j'ai le sentiment que sa France n'est pas la mienne. [La France de Zemmour c'est] l'égoïsme sacré, l'intérêt national qui prime sur tout, qui prime sur les principes, c'est la France au sens de Charles Maurras. [...] Moi je suis du côté de la France de Péguy, une France à laquelle on peut s'attacher par le cœur et par l'esprit, et ce qui me désole avec Zemmour, c'est qu'il incarne le retour de Maurras, du réalisme maurassien, alors que c'est de Péguy que nous avons absolument besoin."

Finkielkraut dit la vérité vraie, la seule exactitude. Nous aimerions tant qu'un candidat puisse mettre la France au cœur des débats tout en chérissant les principes qui sont l'honneur de notre pays, en se refusant à renvoyer dos à dos les "deux camps" de la guerre froide et en considérant Poutine comme le monstre froid qu'il est, et non en allié potentiel.

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